Déclaration de juin 2022 sur le projet Gardens Future

Innovation

Déclaration de juin 2022 sur le projet Gardens Future

Que ce soit au niveau du CSEC en avril 2022, ou au cours des différentes séances de CSE lors des dossiers immobiliers de Guyancourt, Rennes Atalante, et Sophia Antipolis notamment, la CFDT a affirmé sa position sur les espaces dynamiques de travail et s’est beaucoup investie sur ce sujet.

Nous ne reviendrons pas sur les points techniques liés à l’aménagement des espaces physiques de travail, et la nécessité de capitaliser sur les retours d’expérience. Nous nous contenterons ici de rappeler certains points clés, et d’attirer votre attention sur de nouveaux.

Le passage en environnements dynamiques nécessite une adaptation de l’organisation du travail. Car il faudra gérer l’articulation des temps de travail collaboratif, individuel, en présentiel ou en distanciel. Le management de proximité sera fortement sollicité. Déjà en tension, il lui faudra s’approprier et décliner opérationnellement le projet de déménagement dans toutes ses composantes, accompagner les équipes pour faire passer la pilule, négocier le partage des espaces et des temps, savoir concilier des besoins différents voire incompatibles. Tout cela relève d’une véritable gymnastique. Comment le management sera-t-il soutenu dans sa tâche ? Qui prendra la décision finale, qui viendra arbitrer et départager quand des clivages apparaîtront ? Autant d’inconnues dans le dossier fourni aux élus.

Par ailleurs, le point de vue de l’entreprise, purement financier, omet totalement le facteur humain. C’est oublier que la réussite ou l’échec de ce projet y est pourtant étroitement lié, et qu’il ne peut se résumer à de seuls calculs de surface à force de fichiers excel. Or, les conditions de travail vont très vraisemblablement se dégrader encore plus, et le lien social se déliter. On en tient pour preuve l’enquête fournie par vos soins, intitulée « Le travail de demain », du 20 septembre 2021, et qui témoigne de la volonté de 62% de salariés qui n’ont pas d’avenant au contrat de travail d’en demander un, sans doute par dépit et en anticipation face à la tournure des événements.

Une notion importante est totalement absente dans votre dossier : c’est celle de désengagement. Le désengagement est la diminution de l’implication de l’individu vis à vis de son entreprise et de son travail. Le désengagement se concrétise pour l’entreprise par un manque d’efficacité individuelle et collective, une baisse de productivité, un coût élevé en termes de turnover et d’absentéisme, une dégradation des relations avec les clients ou les collègues[1]. Il induit pour l’individu des risques psychosociaux et le mal-être au travail. Le salarié désengagé se sent moins en sécurité dans son poste, il manifeste moins de loyauté envers l’organisation et a tendance à croire de moins en moins en les promesses faites par son employeur. 

Autrement dit, et pour parler le même langage que vous : le désengagement coûte cher.

Dans l’entreprise, et au sein de TGI, le risque de désengagement est bien réel, et déjà avéré. On fait le constat de démissions en nette augmentation.

Ces démissions rendent la notion d’appartenance à l’entreprise de plus en plus désuète (et ne parlons même pas de la fierté). Elles viennent questionner la stratégie globale de l’entreprise comme cause : politique de rétribution et de reconnaissance démotivante et inadaptée à l’époque inflationniste que nous vivons ; manque de sens dû à l’incapacité de la ligne managériale à donner une vision, à faire vivre des valeurs et à permettre l’appropriation de la stratégie ; absence de perspectives d’évolution ; conflits ; charge de travail excessive – sans compter les nombreuses heures supplémentaires à venir  consacrées aux mutations de l’organisation et au déménagement.

Car le flex, cerise sur le gâteau, vient s’ajouter à l’insécurité politique, financière et économique que nous connaissons, et au cumul des tâches engendrées par la mise en place de nouveaux outils et de réorganisations à tout va. Or, l’engagement est directement corrélé à la satisfaction de l’espace, ainsi que l’a démontrée une étude internationale de Steelcase de 2016[2]. Les travailleurs fortement satisfaits vis-à-vis de plusieurs aspects de leur environnement sont ceux qui ont les plus hauts niveaux d’engagement.

Le désengagement est l’une des principales difficultés auxquelles sont confrontées les entreprises aujourd’hui. Toutefois, de nombreux dirigeants ne mesurent pas l’étendue du problème. Cela semble être le cas ici. Car cette question essentielle est totalement évacuée dans votre dossier. Elle doit pourtant être au cœur de votre réflexion.

On souhaite également vous rappeler que tout votre cheminement repose sur plusieurs hypothèses, prises pour des certitudes et, à ce titre, considérées comme irréfutables.

Une de ces hypothèses, fortement ancrée, et déterminante pour la suite, est que le télétravail s’est instauré de façon pérenne et quasi irréversible. Encore faut-il qu’il soit encadré par l’accord télétravail, dont on sait qu’il est sujet à révision. Mais surtout, les pratiques peuvent évoluer, y compris brutalement. Ce sont des enseignements que nous avons retirés de la crise sanitaire et des périodes de confinement et que nous ne devons pas oublier. La période d’incertitude politique, financière, sécuritaire, actuelle est propice à des changements de comportements. Que se passera-t-il si nous venons à être rationnés en gaz, en électricité l’hiver prochain, comme semble l’entendre le cri d’alarme lancé le 26 juin dernier dans le journal La Tribune par trois énergéticiens français ?[3] Les salariés ne préféreront-ils pas venir travailler sur un site chauffé comme Orange Gardens, au lieu de grelotter chez eux et de payer des factures excessives en raison de l’augmentation des prix de l’énergie ?

En d’autres termes : il est regrettable que votre dossier ne prenne pas en compte ces éléments de contexte général, qui peuvent être très déstabilisateurs et remettre en question tous vos plans. Nous vous demandons de réfléchir à la question du désengagement. Nous déplorons l’absence de scénario envisageant la fin d’un télétravail de masse, et vous demandons de l’intégrer à l’avenir.


[1] Voir notamment l’étude Gallup de 2017 :  « State of the Global Workplace »

[2] L’espace de travail de votre entreprise favorise-t-il l’engagement de vos salariés ? – Zevillage

[3] « TotalEnergies, EDF et Engie lancent un cri d’alarme : économisez l’énergie pour éviter les pénuries cet hiver ! », La Tribune, 26 juin 2022

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